Mesure 217

« Je savais que tu allais rejouer !  Tu es le plus grand des concertistes, et tu t’appelles Sacha. Tout le reste est trop étriqué pour toi… » 

Quel sens Marie, violoncelliste, veut-elle donner à la musique qu’elle interprète ?

De quoi sa nièce Morgane, pianiste très perturbée, a-t-elle si peur ?

De quel mal souffre Sacha, jeune violoniste prodigieux, mais au comportement déroutant ? Et pourquoi ne parvient-il pas à jouer la mesure 217 d’un concerto de Mozart ? 

Un roman prenant qui met en scène, en musique et en émotions trois virtuoses qui cherchent leur voie/voix dans une pratique toute personnelle de leur instrument…

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Extraits

Marie (violoncelliste) 

— Non, c’est vrai qu’au début, tu en retires, je ne dirais pas un sentiment de plénitude, le terme est trop fort, mais de fierté et donc, oui, de joie quand la symbiose est parfaite. Malheureusement, très vite, tu te rends compte que tu as contribué de manière trop discrète à cette œuvre commune, et que personne ne t’a demandé d’y déposer ton âme… 
— Et… beaucoup d’instrumentistes ressentent la même chose ? 
— Beaucoup, je ne sais pas. 

Morgane

— Pourquoi tu n’aimes que le noir, Morgane ?
— Parce que le monde va mal…
La bouche de la petite fille se charge de chagrin. Il est vrai qu’à huit ans, l’innocence n’a pas encore cédé la place à la conscience, et que princesses de rêve et princes charmants se marient toujours et ont tous beaucoup d’enfants. Elle insiste cependant : 
— Mais alors, si tout va mal, pourquoi tout le monde ne s’habille pas en noir ? 
— Parce qu’il y en a qui peuvent être heureux malgré tout… 
— Et toi pas ?
—…
— Tu dis rien ! Toi pas ?
— Impossible d’être heureuse toute seule… 

Sacha

Imperturbable, Sacha accorde légèrement son violon, puis dépose sa partition sur le pupitre et la dispose avec maniaquerie – on pourrait dire la « déplie », tant elle est le fruit d’un savant collage permettant au jeune musicien de ne pas devoir tourner les pages. Ceux qui l’observent le voient alors sortir de sous son pull un curieux pendentif et le diriger vers son violon en un geste incantatoire. Ensuite, il s’immobilise, comme agrippé par les signes de sa partition. Avec son archet, il tapote sa cuisse sur un rythme irrégulier, 1, 2, 3, 4, blanc. 1, 2-3, 4, 5-6, blanc, 1, 2… Incompréhensible ! Ce rythme n’a rien à voir avec celui du début du concerto. Puis ses bras s’écartent légèrement en une sorte de frémissement, comme s’il allait prendre son envol. 

Morgane et Sacha

C’est alors qu’en une ondulation de couleuvre, Morgane se faufile au fond de la loge, dont elle pousse la petite porte, et s’encourt droit devant elle, empruntant un escalier, puis un autre qui la ramène à ce qui lui semble ressembler à son point de départ. Elle fait alors volte-face et finit par grimper des marches monumentales qui conduisent à un étage plongé dans la pénombre. À mi-hauteur, elle s’arrête net : sur la dernière des marches est assis un garçon à la chevelure bouclée et abondante, vêtu d’un pull noir très ample et chaussé de mocassins avachis. Il suit du doigt avec une attention extrême les veines de la dalle de marbre sur laquelle il est installé. 
Elle entame une retraite prudente, mais le garçon redresse la tête, dévoilant sur sa poitrine un pendentif accroché à un mince lacet de cuir, un origami en papier résiné figurant une grue grise à la tête rouge.